samedi 28 février 2009

fraternité-Quelle nouvelle démarche intellectuelle propose-t-il ?

47. Quelle nouvelle démarche intellectuelle propose-t-il ?
Pour mesurer le trajet fait depuis 1957, il sera nécessaire d’appréhender plus concrètement les valeurs de la société de l’époque et de faire un détour par les conceptions médicales ayant cours dans ces années cinquante, au moment précisément où Joseph Wresinski faisait son entrée dans le Camp de Noisy. C’est Boris Cyrulnik psychiatre, analyste, éthologue contemporain, qui fut enfant une victime innocente de la guerre de 39 / 40 qui nous mettra sur la voie, lui qui est allé à l’école pour la première fois à 11 ans. Boris Cyrulnik est saisissant quand il parle de la façon dont on voyait les enfants dans les années cinquante : " Quand dans les années cinquante, Spitz, Bowly et Robertson ont filmé des enfants banalement séparés de leur mère, ils ont rendu observable un fait que la pensée collective de l’époque n’envisageait même pas : un enfant privé de sa mère peut souffrir de troubles affectifs. Quand je raconte cette histoire aujourd’hui, les étudiants croient que je parle de Jurassic-Psy. Ce qui comptait dans le discours social de l’époque, c’était le poids et la mesure, les " ingesta " et les " excreta " : on pesait donc un enfant avant son placement en institution et, s’il avait grossi, c’était la preuve que l’institution était bonne ! La qualité s’évaluait en kilos d’enfant ! Il fallait être psychanalyste pour oser penser qu’une qualité pouvait s’évaluer autrement, et qu’un trouble manifesté aujourd’hui pouvait s’enraciner dans une privation survenue hier. Il fallait, en plus, être un psychanalyste non-intégriste pour oser penser que ce qui se manifeste dans l’interaction observable n’exclut pas l’historisation du sujet, nécessaire à son identité." .
Dans un tel contexte nous ne nous étonnerons pas alors qu’en 1960, l’association " Groupe d’action culture et relogement " fut interdite par le Ministère de l’Intérieur. Les Renseignements Généraux furent réticents à la création de cette association de " pauvres " (considérés comme alcooliques, délinquants, mauvais parents, chômeurs) association dont le but incompréhensible ne répondait en aucune façon aux canons des bonnes conduites de l’époque. Joseph Wresinski ne pouvait a fortiori faire comprendre au monde que la séparation des enfants de leur mère faisait souffrir les mères, les pères et les enfants. C’est cependant une des premières vérités que Joseph Wresinski mit sur la place publique car le placement des enfants des pauvres dans le bidonville était une solution jugée élégante, rationnelle et la plus simple aux yeux de beaucoup. " Vos gosses, ils seront mieux ailleurs !", discours courant, basé sur une analyse de l’incompétence de la famille et sur la reconnaissance d’une autre compétence ailleurs. Discours en fait très moralisateur.
Textes choisis
" Que des fonctionnaires à travers les capitales de l’Europe nous l’ont affirmé : ces gens ne sont pas des pauvres, ce sont des vicieux, des alcooliques, des malades mentaux, des inadaptés. Ils se regroupent sans cesse, mais ce voisinage est néfaste et nous les dispersons. Que de familles avons-nous visitées à travers ces capitales, isolées, tapies dans leur logement, entourées d’un voisinage hostile. L’assistante sociale devrait leur apporter l’ersatz des relations humaines, fraternelles qu’aurait pu leur offrir un voisinage familier qui aurait partagé leur sort. Est-il nécessaire d’ajouter que cette ségrégation voulue ou inconsciente ne repose sur aucune donnée sociologique ou psychologique objective ? […] Notre expérience n’est d’ailleurs pas unique. De multiples études américaines et canadiennes révèlent que les familles-problèmes semblent avoir hérité un état de dépendance chronique de la charité publique de leurs parents et de leurs grands-parents. L’hypothèse s’impose que nous sommes en présence d’une pauvreté marginale et d’une culture de la misère héritée. Peut-être rejoignons-nous ici la thèse d’Oscar Lewis sur la culture de pauvreté. Il appartient aux hommes de science d’approfondir ces questions […] Si nous avons raison de penser que ces familles sont les laissées pour compte des classes laborieuses pauvres, leur premier besoin ne serait-il pas d’y retrouver leur place ?".
Introduction au colloque sur les familles inadaptées sous le patronage de la Commission française pour l’Unesco. Paris le 10 février 1964.

Extraits du livre
Agir avec Joseph Wresinski.
L’engagement républicain du fondateur du Mouvement ATD Quart Monde .
Editions chronique sociale-2008- 320 p.
En vente aux éditions chronique sociale, aux éditions Quart Monde et en librairie. 16,90 euros

samedi 21 février 2009

Liberté-Pourquoi a-t-il inventé le "Quart-Monde"?

36. Pourquoi a-t-il inventé le "Quart Monde"?
Il ne pouvait penser qu’à l’avenir collectif des populations misérables. Difficile entreprise lorsque tout est fait dans la société environnante pour qualifier la misère avec des critères individualisés, de nature psychologique, voire génétique.
Très clairement, dés 1963, Joseph Wresinski voulait faire entrer dans notre société un groupe et non seulement des personnes : " Nous n’aurons pas réussi si cette communauté (des pauvres) n’est pas acceptée par la société, par l’Église, par la commune, par le Ministère de l’Intérieur et celui de la Population, par les écoles aussi et par toutes les institutions qui forment la société. D’autre part, il faudra aussi que les familles du Camp acceptent pleinement le monde environnant, qu’elles veuillent vivre d’une manière qui ne soit pas intolérable à ceux qui les entourent." .
Très clairement aussi en 1970 dit-il : " Une seule couche de population est totalement opprimée et toutes les autres l’oppriment. Cette couche-là est celle du Quart-Monde." . Version moderne des propos du créateur du Tiers-État en 1789, Sieyès lui qui, plus incisif affirmait : " Qui oserait dire que le Tiers-État n’a pas en lui tout ce qu’il faut pour constituer une nation ? Si l’on ôtait l’ordre privilégié, la nation ne serait pas quelque chose de moins, mais quelque chose de plus […] Que serait le Tiers-Etat sans l’ordre privilégié ? Tout, mais un tout bien florissant. Rien ne peut aller sans lui, tout irait infiniment mieux sans les autres." .
Joseph Wresinski, l’homme de la dignité des pauvres, sans attaquer les privilégiés, ne manquait pas une occasion de dire que sans la participation des pauvres notre société était bancale, que sans leur avis, sans leur parole surtout, notre monde manquait d’épaisseur, d’humanité. Il savait aussi que Tiers-État et pauvreté extrême ne recouvraient pas les mêmes réalités. Il s’intéressa aux exclus du Tiers-État.
Sa tâche fut d’expérimenter une autre approche. D’abord pour convaincre autour de lui de l’étendue de cette misère mais aussi pour dialoguer avec les très pauvres dans d’autres registres que celui de la culpabilité. La dignité donc et toujours, mais au service de la cause des plus pauvres et non dans le but de maintenir une " pauvreté témoin " repoussante. Cette tâche, un peu étrange, mal comprise au départ, fut plus explicite à partir de 1968, date à laquelle le Mouvement ATD Quart-Monde qu’il avait fondé se donna des objectifs politiques. Elle ne fut reconnue que beaucoup plus tard grâce au rapport au Conseil économique et social, mais grâce aussi aux progrès de la population dite des " très pauvres " pour acquérir la capacité à s’exprimer publiquement et alors le Mouvement ATD Quart-Monde put assumer son rôle de représentation.
Textes choisis
" Le Quart-Monde est un peuple qui n’a pas ses intérêts défendus par les syndicats, qui ne semble entrer dans aucun des intérêts de la classe ouvrière ni des autres cercles professionnels. Parmi les partis politiques, aucun ne l’a jamais pris en charge alors que les services sociaux ne le connaissent que pour le mettre en tutelle ou pour lui retirer ses enfants. C’est cela le Quart-Monde. Peuple de sous-prolétaires, disait Karl Marx, peuple au-dessous de tout le reste de l’humanité, peuple au plus bas de l’échelle sociale. Peuple d’inadaptés disent certains, peuple "infra humain " disent d’autres, peuple de sous-privilégiés disent les Anglais. Nous l’appelons le Quart-Monde non pas du tout en opposition avec le Tiers-Monde mais parce que nous pensons très sérieusement qu’il est l’incarnation, la voix, le signe de toutes les oppressions, de toutes les punitions qui sont infligées aux hommes, lorsque ceux-ci ne correspondent pas aux idéaux qui fondent notre société.".
Les plus pauvres, ferments du progrès de la société de consommation, Conférence à Nancy, 12 mai 1969.

Extraits du livre
Agir avec Joseph Wresinski.
L’engagement républicain du fondateur du Mouvement ATD Quart Monde .
Editions chronique sociale-2008- 320 p.
En vente aux éditions chronique sociale, aux éditions Quart Monde et en librairie. 16,90 euros

dimanche 15 février 2009

Egalité-Avait-il une théorie pour lutter contre l'exclusion?

10. Avait-il une théorie pour lutter contre l’exclusion ?
Il a le premier situé la question de la pauvreté dans le fonctionnement de la société et non dans les carences des personnes pauvres, alors que tous les fonctionnaires de la banlieue parisienne et même de l’Europe lui assuraient que ces gens étaient des malades mentaux, des alcooliques, des inadaptés. Et ceci dès les années soixante.
C’est donc au niveau de la raison, de l’intelligence, qu’il pensait agir et non au niveau des sentiments. Le cœur ne suffit pas. Les jugements hâtifs et catégoriques des responsables s’expliquaient par le fait que dans les années cinquante, dans cette Europe d’après guerre qui renouait avec la croissance, on pensait que la misère avait disparu. Or en réalité, dans de nombreux bidonvilles, des populations vivaient dans la honte. De temps à autre un fait divers particulièrement dramatique les faisait sortir de l’ombre, si bien que les pouvoirs publics et les Églises ne pouvaient pas les ignorer. La politique qui se préparait était radicale mais erronée sur le fond. En 1963, Joseph Wresinski interpella les parlementaires à propos de la loi Debré sur la résorption des bidonvilles. Les pouvoirs publics avaient cru bien faire en décidant de détruire les bidonvilles pour faire disparaître le symptôme de la grande pauvreté. Mais ils n’avaient rien à offrir aux populations qui se terraient dans ces lieux. Joseph Wresinski tint alors un discours dérangeant. Son analyse préfigurait celle de l’anthropologue Martine Xiberras : " La société a tendance à considérer les exclus comme responsables de leur exclusion et leur reproche cette absence sociale ou leur manque de participation au modèle officiel. Les exclus, par contre, pour lutter contre leur isolement, ont tendance à développer leur propre mode d’organisation et reprochent à la société son manque de reconnaissance en leur faveur. Il y a donc une rupture du lien symbolique qui s’installe entre ces deux acteurs et qui prend la forme d’un conflit ouvert ou d’une guerre des images ou de points de vue qui s’opposent jusqu’à nier réciproquement leur existence."
Textes choisis

" Comment se fait-il que, dans une société qui recherche une répartition équitable de certains biens économiques, sociaux, culturels ou physiologiques, considérés comme indispensables à l’épanouissement de l’homme, un si grand nombre de familles en demeurent encore privées. Certains nous affirment que ces familles se détournent volontiers de ce qui leur est offert. Leur état de pauvreté insolite correspondrait en quelque sorte à leur nature et elles ne souhaiteraient pas partager la vie d’une société évoluée. Celle-ci aurait tort de leur attribuer les besoins de l’ensemble. Selon aucun d’eux d’ailleurs, ces familles représenteraient le déchet normal de toute communauté humaine. Une telle conception du problème ne peut pas nous satisfaire [...] Si des familles aujourd’hui errent d’un terrain vague à l’autre, fuyant les Services qui peuvent leur prendre leurs enfants, si elles se tapissent dans des taudis insalubres et évitent les consultations médicales ou le préventorium, si d’une façon générale, elles assument un mode de vie qui attire le mépris et la méfiance de leur entourage, il n’est pas dit que cette vie sous-humaine corresponde à leur nature et à leurs besoins. Il est beaucoup plus probable que la société n’a pas su leur offrir la possibilité de satisfaire leurs besoins en leur proposant ses biens sous une forme qui correspondent à leur conception des choses ou dans des conditions conformes à leurs dimensions particulières. [...] Il semblerait que la société se voie donc, une fois de plus obligée de pousser plus avant l’analyse. Plutôt que de juger ces familles comme des déviants invétérés ou de les classer comme des malades mentaux incurables, ce qui en vérité n’explique rien, la raison nous pousse à nous demander si nous avons bien compris leur impasse.".
Introduction de Nouveaux aspects de la famille, Éléments d’analyse de la famille inadaptée, ÉditionsATD , cycle d’étude 1961 / 1962, p. 7.

Extraits du livre
Agir avec Joseph Wresinski.
L’engagement républicain du fondateur du Mouvement ATD Quart Monde .
Editions chronique sociale-2008- 320 p.
En vente aux éditions chronique sociale, aux éditions Quart Monde et en librairie. 16,90 euros

mardi 3 février 2009

Fraternité - Se référer à une religion est-il nécessaire ?

44. Se référer à une religion est-il nécessaire ?
Dans sa réflexion sur l’ordre établi, Joseph Wresinski a intégré des références diverses. Marx l’interpellait par sa préférence pour les humbles malgré ses jugements sur le " Lumpenprolétariat ", il y revient souvent nous l’avons vu. L’Église en tant qu’institution lui semblait absente des lieux de misère. Il est persuadé cependant que les plus pauvres ont besoin de Dieu. C’est sans aucun doute un point de désaccord fondamental avec les plus laïques de ceux qui, sans être croyants, auraient cependant le désir de s’investir dans la lutte contre la misère auprès du Mouvement ATD Quart-Monde.[…]
Depuis la création du Mouvement ATD Quart Monde, il faut noter que malgré l’origine catholique de la majorité de ses membres, Joseph Wresinski a toujours recherché une interconnexion des religions (parce que l’extrême pauvreté avait le même visage sur toute la planète) et non le repli sur sa propre religion, c’est-à-dire qu’il a voulu l’ouverture maximale à toutes les croyances. Imposer aux autres sa vision des choses ne lui convenait d’ailleurs pas : Ne disait-il pas aussi que le Mouvement n’était pas confessionnel pour dire plus clairement que tous ceux qui croient en Dieu, si nombreux dans le Mouvement, ne devaient pas y venir au nom de leur foi, avec une banderole de prosélytisme !
Il a donc affirmé que le Mouvement ne se définissait pas comme un rassemblement d’hommes sans croyances et qu’il ne se définissait pas non plus comme le Mouvement d’une croyance particulière. Ce ne sont pas, semble-t-il, les personnes athées ni les agnostiques ni les libres-penseurs qu’il mettait en cause, ce sont ceux qui refusent toute possibilité de croyances aux autres : les autoritaires, ceux qui voudraient combattre l’opium du peuple en dénigrant la religion ! Joseph Wresinski reconnaît aux athées, aux agnostiques et aux libres-penseurs leur liberté de pensée, c’est incontestable. Il appelle à leur sens des responsabilités pour jouer leur rôle dans la lutte pour la justice et la reconnaissance de la dignité des hommes. Et sans aucun doute est-il très proche de certains. Pour Joseph Wresinski, il n’y a pas, dans le Mouvement, d’obligation de croyances ni de contrainte sur la liberté de conscience. C’est donc le contraire d’un embrigadement à la façon des sectes puisque c’est l’ouverture et non la fermeture. Ce n’est pas très éloigné de la laïcité avec une nuance importante : le monde de Joseph Wresinski s’organise autour de la foi, lui-même disant n’avoir de comptes à rendre qu’à Dieu alors que notre monde s’organise sans la foi, nous dirions que nous n’avons de comptes à rendre qu’aux hommes et à notre conscience. Bien que regrettant cette tendance à vouloir confessionnaliser toute spiritualité nous pourrions reconnaître que, dans le quotidien, Joseph Wresinski était plus proche du réel que quiconque. Certains ont dit en France que la gauche n’avait pas l’apanage du cœur. Nous pourrions de la même façon lui dire à posteriori, que les religions, les confessions, n’ont pas l’apanage de la spiritualité. Les mouvements du cœur et plus encore la vie de l’esprit, n’ont que faire des appartenances sociologiques ou religieuses. Tout le monde le comprend bien, Joseph Wresinski peut-être plus qu’un autre. C’est pourquoi il pouvait se permettre de rappeler avec force que la monopolisation des pauvres par les chrétiens est odieuse! Nous ajouterions que la monopolisation des pauvres par quiconque serait tout aussi odieuse.
Joseph Wresinski admit couramment que si pour lui, elle est fondée sur la foi, la conviction profonde que tout homme porte en lui une valeur fondamentale qui fait sa dignité d’homme, existe aussi dans les diverses spiritualités des uns et des autres. Cette reconnaissance de la nécessité d’une certaine diversité spirituelle est essentielle car c’est elle qui conditionne l’appel aux changements de la société. Si par hasard, le Mouvement devenait un Mouvement confessionnel - et il aurait pu se déterminer dans ce sens - cela ne changerait en rien le fait que la société française elle-même n’est pas régie par des valeurs confessionnelles et que dans le reste du monde d’autres références philosophiques ont cours. Par suite le message de Joseph Wresinski et du Mouvement ATD Quart-Monde à la société devrait donc toujours être rendu intelligible pour la société et utilisable par la société dans l’intérêt des pauvres eux-mêmes. Par conséquent Joseph Wresinski, voulant lutter contre l’hostilité des uns et des autres envers le Sous-Prolétariat a sans cesse pris soin de s’adresser à tous au-delà des principes religieux de sa propre religion, au-delà des valeurs confessionnelles les plus courantes dans nos pays d’Europe.[..]
Joseph Wresinski un homme religieux, oui. Mais un homme religieux qui voyait le réel et ne l’enveloppait pas d’un nuage de faux-semblant. Un homme donc qui, s’il considérait que la foi était totalement liée à son combat personnel, ne considérait pas que les autres devraient être identiques à lui-même mais plutôt différents de lui-même. La richesse de la diversité spirituelle et culturelle lui était apparue clairement. C’est donc au fond bien de la fraternité de la devise républicaine qu’il s’agissait car c’est elle seule qui pouvait faire ciment.
Textes choisis
" Car est-il légitime que nous imposions aux hommes une conception de Dieu, de l’homme ou des structures de la société ? La leur offrir est légitime, si cela nous est demandé. […] Autrement, les apporter de notre propre initiative ne peut être qu’une intrusion intempestive chez les pauvres, ils ne pourront que nous maudire, de même que le fermier, qui espère et fait des prières pour que l’eau tombe dans son champs, maudit la tornade qui vient et détruit la récolte. Souvent nous faisons comme l’Idiot de Dostoïesky : il n’avait rien de mauvais en lui, mais il n’a réussi qu’à détruire.".
Nous n’apporterons aux pauvres que ce qu’eux-mêmes auront appris à nous demander, Réunion de volontaires, Été 1966,
Écrits et paroles, t 1, p. 447.
" Si on se met à dire, par exemple, que si on n’est pas chrétien on ne peut pas sauver la population, c’est faux : on se met à vouloir construire sur une pensée à soi, au lieu de construire d’après les leçons de la population.".
Après le pourquoi, le comment d’un corps volontarial, juillet / août / septembre 1979, Dossiers de Pierrelaye.
" Le Mouvement est un carrefour et il doit le rester. Sachons bien que la population n’a pas les moyens ni sociaux ni culturels ni religieux, de se conformer à des obligations, à des rites, à des dogmes et par conséquent nous n’avons pas à lui imposer nos idées, nos doctrines, nos options politiques, notre spiritualité.".
Échos des Assises 81, juillet / août / septembre 1981, Dossiers de Pierrelaye.
" Le Mouvement est interconfessionnel. Un assez grand nombre de ses volontaires et alliées ne sont pas des croyants. Les " volontaires " qui l’animent sont réunis par cette volonté de faire prendre conscience aux plus pauvres qu’ils sont libérables, et que ce n’est qu’ensemble qu’on se libérera. Chez nous, même les athées vont donc lutter pour le droit à la spiritualité ! Même si pour eux, tout n’est pas clair dans la foi, c’est pour eux un droit important : le droit de prier, le droit aux sacrements, le droit d’être l’Église ! J’ai même vu des volontaires non-croyants affronter les prêtres pour obtenir la célébration d’une communion ou d’un mariage que l’on voulait retarder ou refuser. C’est là une démarche fondamentale dans le mouvement : ce respect profond pour le droit au spirituel. Les pauvres aussi ont le droit de connaître Dieu.".
Solidaires … ou frères ? Interview pour
Les annales du Sacré-cœur d’Issoudun, juin 1985.
" Tout le Mouvement a été bâti comme cela : ce n’est pas un homme qui fait des projets, mais un événement se présente ou une personne me sollicite et cela suscite chez moi un intérêt immédiat, spontanément j’ai toujours essayé de répondre." oui " mais avec cette réserve " on va voir." . À tous les volontaires, je dis : " Il faut faire confiance, mais en gardant toujours la distance pour voir si notre confiance est bien placée.". J’ai toujours été comme cela. Je crois que ma mère était comme cela." .
Entretien avec Marie-Pierre Carretier, pour l’Express, décembre 1987.
Extrait du livre "agir avec Joseph Wresinski", éditions chronique sociale