Film : «A propos d’Elly »
Film : «A propos d’Elly »
Film de Asghar Farhadi
Un film iranien à revoir en ce moment où les révolutions en Tunisie et en Egypte nous emplissent d’espoir et d’une certaine crainte.
Il est traité à la manière d’un film à énigme. Mi-film policier, mi-film dramatique. En effet c’est est un film psychologique sur la classe moyenne iranienne un peu occidentalisée mais pas totalement occidentalisée. Il prend maintenant des allures de documentaire. La contrainte des traditions affleure constamment dans une modernité affichée. Les individus se débattent pour trouver leur place dans le groupe et sans aucun doute dans la société iranienne, allant trop loin ou pas assez loin dans leurs prises de positions selon les séquences.
De jeunes couples de la classe moyenne iranienne vont passer un week-end de privilégiés au bord de mer. Faute de la maison dans laquelle ils croyaient séjourner, ils ont dû forcer la porte d’une maison abandonnée et en très mauvais état au plus près de la plage. Un début angoissant pour un film dont l’ambiance est pesante dès le début malgré la gaieté de cette bande de jeunes très insouciants accompagnés de leurs enfants. Ces parents ont des comportements estudiantins comme s’ils étaient libérés d’une pression qui ne dit pas son nom. Leur amie commune Sépideh, jeune mère de famille dynamique et moderne a organisé ce séjour, mais elle a pris l’initiative d’ajouter au groupe habituel son amie Elly que les autres ne connaissent pas encore et un de ses cousins, Ahmad, de retour d’Allemagne où il a vécu une histoire d’amour malheureux. Le groupe a la ferme intention de bien s’amuser mais c’est le drame qui se produira.
Elly est le personnage central, énigmatique. Réservée et secrète elle ne semble pas à sa place.
Pour se distraire, le groupe soudé par une histoire commune, pratique le jeu de mime qui met mal à l’aise certains des amis et le spectateur. Se dévoile peu à peu le projet de Sépineh de marier Elly à Ahmad. Des allusions, des moqueries renforcent le sentiment d’une adhésion du groupe au modèle du mariage arrangé. La liberté des uns et des autres, affichée, semble trouble.
Les évènements qui conduisent à la noyade d’un enfant font penser au très beau film israélien « My father, my lord »
Le film qui a eu l’Ours d’argent du meilleur réalisateur au Festival de Berlin 2009, a été tourné avant la contestation anti- Ahmadinejad.
Ce film sur le statut de la femme en Iran, la puissance des classes moyennes et leur réelle impuissance à se libérer totalement des traditions doit être vu ou revu.
Marie-Hélène Dacos-Burgues
Film iranien, écrit et réalisé par Asghar Farhadi, Iran 2009, avec Golshifteh Farahani, Taraneh Alidourshi, Shahab Hosseini, Merila Zarei, Mani Haghighi, Peyman Moavi